Volume 04 pages 100-101
« La protection de la paysannerie (Der Bauernschutz)
ne porte pas sur la personne du paysan (nul, évidemment,
ne se prononcerait contre une telle protection), mais sur
sa propriété. Or, c’est précisément la propriété du paysan
qui est la cause essentielle de sa paupérisation et de son
abaissement. D’ores et déjà, les ouvriers agricoles salariés
connaissent souvent une situation meilleure que celle des
petits paysans. La protection de la paysannerie ne sauve
garde pas celle-ci contre la misère, mais sauvegarde les fers
qui enchaînent le paysan à sa misère » (p. 320). La transfor
mation radicale de l’agriculture entière par le capitalisme
ne fait que commencer, mais elle progresse rapidement, en
faisant du paysan un travailleur salarié et en accélérant
l’exode rural. Toute tentative de ireiner ce mouvement
serait réactionnaire et nuisible : si pénibles qu’en soient
les conséquences dans la société actuelle, les entraves ap
portées à ce processus ont des résultats pires encore et ré
duisent la population laborieuse à une situation encore
plus misérable et désespérée. Dans la société actuelle, le
seul objectif que puisse se fixer une action d’avant-garde
est d’atténuer les effets funestes de l’essor capitaliste sur
la population, de renforcer la conscience de cette dernière
et sa capacité de défense collective. Pour cette raison,
Kautsky insiste sur les mesures suivantes : nécessité d’as
surer la liberté de déplacement, etc., suppression de tous
les vestiges de la féodalité dans l’agriculture (par exemple,
les Gesindeordnungen*, qui placent les ouvriers agricoles
dans une situation personnellement dépendante et en font
des demi-serfs), interdiction de faire travailler les enfants
avant l’âge de 14 ans, journée do travail de huit heures,
sévère police sanitaire des logements des ouvriers, etc.,
etc.
Il faut espérer que le livre de Kautsky paraîtra aussi
en traduction russe.
Rédigé en mars 1899 Conforme au texte de la revue
Publié en avril 1899 dans le n 9 4
de la revue < Natchalo »
Signé : VI. I line
Voir le renvoi à la page 52.
COMPTE RENDU
HOBSON- L'évolution du capitalisme contemporain. Traduit de
l’anglais. Saint-Pétersbourg 1898. Editions O. Popova. Prix: 1 r. 50.
A vrai dire, le livre de Hobson ne constitue pas une
étude sur l’évolution du capitalisme contemporain, mais
une série d’essais, utilisant surtout des données anglaises,
sur le développement industriel de ces dernières années.
Aussi le titre est-il un peu trop vaste : l’auteur ne traite
pas du tout de l’agriculture, et il est loin d’examiner l’éco
nomie industrielle elle-même dans toute son ampleur. Par
son orientation, Hobson se rattache, comme les écrivains
bien connus, les époux Webb, à l’un des courants avancés
de la pensée sociale anglaise. Il observe à l’égard du « capi
talisme contemporain » une attitude critique, admettant
sans réserve la nécessité de le remplacer par une forme supé
rieure d’économie sociale, et parlant de ce remplacement
avec un sens pratique et réformateur typiquement anglais.
C’est surtout par la voie empirique, sous l’influence de
la récente histoire de la législation des fabriques, du mou
vement ouvrier, de l’activité des municipalités en Angle
terre, etc., qu’il acquiert la conviction que la réforme est
indispensable. On ne relève pas chez lui de vues théoriques
d’ensemble, cohérentes, pouvant servir de base à son pro
gramme de réformes et éclairer les questions particulières
qui en découlent. Aussi, Hobson.est-il surtout fort lorsqu’il
s’agit de grouper et de décrire les dernières données statis
tiques et économiques. Par contre, dès qu’on touche aux
questions théoriques générales de l’économie politique, il
se montre très inférieur à sa tâche. Le lecteur russe est
même surpris de voir comment un auteur ayant des connais
sances aussi vastes et des aspirations aussi pratiques, qui