Volume 04 pages 38-39
‘ représentent non la valeur du produit, mais les sommes
payées pour la mouture. Enfin, dans la dernière province,
celle d’Arkhangelsk, le «mouvement de recul affectant
l’industrie» découvert par M. Karychev s’explique tout
simplement par une étrange erreur dans ses calculs: en
réalité, la production totale des fabriques d’Arkhangelsk
selon la Liste n’est pas de 1 300 000 r. comme il l’indique
à deux reprises (pp. 40 et 39 , contre 3 200 000 r. en 1885
1891), mais bien 6 900 000 r. dont 6 500 000 r. pour 18
scieries (Liste, p. 247).
Dressant le bilan de ce qui précède, on est amené à
conclure que M. Karychev a dépouillé les matériaux avec
un manque stupéfiant d’attention et d’esprit critique, et
qu’il a commis pour cette raison une série d’erreurs des
plus grossières. Quant aux calculs auxquels il s’est livré
avec ses collaborateurs à partir des chiffres de la Liste,
il convient de dire que leur valeur statistique perd beau
coup du fait que M. Karychev n’a pas publié de résultats
complets, c’est-à-dire le nombre des fabriques et des ou
vriers, ainsi que la valeur globale de la production pour
toutes les provinces et toutes les branches industrielles (bien
qu’il ait visiblement effectué ces calculs et que leur pu
blication intégrale eût, d’une part, rendu possible une vé
rification et, d’autre part, apporté une aide notable à
tous ceux qui se servent de la Listé). Ainsi, l’élaboration
purement statistique des matériaux s’est révélée extrê
mement fragmentaire, incomplète, non systématique, et
les conclusions que M. Karychev s’est hâté do dégager sont
en grande partie un exemple do ce qu’il ne faut pas faire
avec les chiffres.
Passant à la question, posée plus haut, de l’état ac
tuel de notre statistique des fabriques et des usines, nous
devons dire avant tout que si « des données statistiques
complètes et dignes de foi sur les diverses branches de la
production » sont « absolument indispensables » (c’est ainsi
que s’exprime l’« Introduction » à la Liste, et il est impos
sible de ne pas être d’accord là-dessus), il faut, pour les
obtenir, un recensement rationnel des industries compre
nant la totalité des établissements, des entreprises et des
travaux industriels, et renouvelé périodiquement après
un laps de temps déterminé. Si les chiffres du premier
recensement national du 28 janvier 18975 sur les occupa
tions auxquelles se livre la population se révèlent satisfai
sants et s’ils sont mis en œuvre, comme il se doit, ils
faciliteront de beaucoup le recensement des industries.
Mais jusque-là, tant qu’il n’y en a point, il ne peut être
question que d’enregistrer quelques gros établissements
industriels. Le système actuel de collectage et d’inter
prétation des renseignements statistiques sur ces grandes
entreprises (les « fabriques et usines » selon la terminolo
gie en vigueur) doit être reconnu comme absolument in
suffisant. Le premier défaut en est l’éparpillement de la
statistique dans différents «services» et l’absence d’une
organisation spécialisée, consacrée tout entière à la sta
tistique, centralisant le collectage, la vérification et l’exa
men de tous les renseignements concernant l’ensemble
des fabriques et des usines. Quand on dépouille les don
nées de la statistique actuelle en Russie, on s’engage
sur un terrain cloisonné en tous sens par les frontières
de divers « services » (dont les procédés et les moyens
d’enregistrement sont différents, etc.). Il arrive même que
ces démarcations passent à l’intérieur de certaines
entreprises, de telle sorte qu’une partie de l’usine (par
exemple la fonderie) relève du département de la métallur
gie, et une autre (par exemple, la fabrication d’articles
en fer) du département du Commerce et des Manufactures.
On comprend combien cela complique l’utilisation des
données et dans quelles erreurs risquent de tomber (et
tombent effectivement) les chercheurs qui n’accordent pas
une attention suffisante à cette question complexe. No
tamment pour ce qui est de la vérification des renseigne
ments, il faut dire que l’inspection des fabriques ne sera
évidemment jamais en mesure de vérifier si toutes les dé
clarations de tous les propriétaires de fabrique sont con
formes à la réalité. Avec le système actuel (quand les ren
seignements sont recueillis non au moyen d’un recense
ment effectué par un corps spécial d’agents, mais par l’en
voi de questionnaires aux propriétaires de fabrique), il
faut surtout que l’organisation statistique centrale com
munique sans intermédiaire avec tous les propriétaires de
fabriques et d’usines, qu’elle contrôle régulièrement l'homo
généité des renseignements en veillant à ce qu’ils soient