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(même leurs pauvres rudiments d’instruction ont commencé
à éveiller chez eux le sentiment de la dignité humaine),
contre l’arbitraire effréné de la bande de nobles loqueteux
qu’on a lancés contre les paysans sous la dénomination de
zemskié natchalniki93. On connaît les famines toujours
plus fréquentes dont sont victimes des millions d’hommes,
qui ne peuvent rester des témoins indifférents devant de
telles « difficultés de ravitaillement ». On connaît le dé
veloppement des sectes et de l’esprit rationaliste dans les
milieux paysans ; or, la protestation politique sous un
voile religieux est un phénomène propre à tous les peuples
à un certain stade de leur évolution, et non à la seule Russie.
Ainsi, l’existence d’éléments révolutionnaires au sein de
la paysannerie ne fait pas le moindre doute. Nous ne voulons
nullement exagérer la force de ces éléments, nous n’ou
blions pas l’inculture politique et l’ignorance des paysans,
nous ne voulons aucunement effacer la différence entre
«l’émeute russe, insensée et impitoyable», et la lutte ré
volutionnaire ; nous n’oublions pas le moins du monde
que le gouvernement dispose d’une quantité de moyens
pour tromper et corrompre politiquement les paysans. Mais
de tout cela il ressort uniquement qu’il serait absurde de
vouloir présenter la paysannerie comme le promoteur du
mouvement révolutionnaire, que le parti qui ferait dépendre
le caractère révolutionnaire de son mouvement de l’état
d’esprit révolutionnaire de la paysannerie serait insensé.
Il n’est nullement question de proposer quoi que ce soit
de semblable aux social-démocrates russes. Nous disons
seulement que le parti ouvrier ne saurait, sans déroger aux
préceptes fondamentaux du marxisme et sans commettre
une énorme faute politique, laisser de côté les éléments
révolutionnaires qui existent aussi dans la paysannerie, et
ne pas les soutenir. Ces éléments révolutionnaires de la
paysannerie russe sauront-ils se manifester au moins aussi
résolument que l’ont fait les paysans d’Europe occidentale
lors du renversement de l’absolutisme ? C’est là une question
à laquelle l’histoire n’a pas encore donné de réponse. S’ils
en sont incapables, la social-démocratie n’y perdra rien
qu’il s’agisse de sa bonne renommée ou de son mouvement,
car ce ne sera point de sa faute si la paysannerie ne répond
pas (n’aura peut-être pas été en mesure de répondre) à son