☭ Lénine : Œuvres complètes informatisées

| Éditions Communistus

Volume 04 pages 216-217

NOTRE PROGRAMME
La social-démocratie internationale traverse à l’heure
actuelle une période de flottement de la pensée. Jusqu’à
présent, les doctrines de Marx et d’Engels étaient considé
rées comme le fondement solide de la théorie révolutionnaire;
maintenant, des voix s’élèvent de toutes parts pour procla
mer ces doctrines insuffisantes et périmées. Quiconque se
déclare social-démocrate et se propose de publier un organe
social-démocrate doit définir nettement son attitude envers
une question qui est loin de préoccuper uniquement les so
-zial-démocrates allemands.

Nous nous plaçons entièrement sur le terrain de la theo
ie de Marx : elle a été la première à faire du socialisme,.

d’utopie qu’il était, une science, à en poser les fondements
inébranlables, à tracer le chemin à suivre en la développant
plus avant et en l’élaborant dans tous ses détails. Elle a
mis à nu la nature de l’économie capitaliste moderne en
expliquant comment le salariat, l’achat do la force de tra
vail, dissimule l’asservissement de millions de non-possé
dants par une poignée de capitalistes, do propriétaires de
terres, de fabriques, de mines, etc. Elle a montré comment
toute l’évolution du capitalisme moderne tend à évincer la
petite production par la grande et crée les conditions qui
rendent possible et nécessaire l’organisation socialiste de
la société. Elle nous a appris à discerner, derrière le voile
des coutumes enracinées, des intrigues politiques, des lois
subtiles et des doctrines astucieuses, la lutte des classes, la
lutte qui oppose les diverses classes possédantes à la masse
des non-possédants, au prolétariat, qui est à la tête de tous
les non-possédants. Elle a élucidé la véritable tâche d’un parti

socialiste révolutionnaire, qui n’est pas d’inventer des
plans de réorganisation de la société, ou de prêcher aux
capitalistes et à leurs valets l’amélioration du sort des ou
vriers, ou de tramer des complots, mais d'organiser la lutte
de classe du prolétariat et de diriger cette lutte dont le but fi
nal est la conquête du pouvoir politique par le prolétariat et
l'organisation de la société socialiste. • f'
Et maintenant, nous demandons : qu’ont donc apporté
de nouveau à cette théorie ces tonitruants « rénovateurs »
qui font tant de tapage à l’heure actuelle et qui se groupent
autour du socialiste allemand Bernstein ? Absolument rien'.

ils n’ont pas lait avancer d’un pas la science que Marx et
Engels nous ont recommandé de développer ; ils n’ont en
seigné au prolétariat aucun nouveau procédé de lutte : ils
n’ont fait que reculer en empruntant des bribes de théories
arriérées et en prêchant au prolétariat non pas la théorie
do la lutte, mais celle des concessions—des concessions aux
pires ennemis du prolétariat, aux gouvernements et. aux
partis bourgeois, qui cherchent inlassablement de nouveaux
moyens de traquer les socialistes. Plékhanov, l’un des
fondateurs et des chefs de la social-démocratie russe, a eu
tout à fait raison de critiquer impitoyablement la récente
«critique» de Bernstein81, dont les conceptions viennent
également d’être répudiées par les représentants dos ouvriers
allemands (au congres de Hanovre82).

Nous savons que ces mots nous vaudront une avalanche
d’accusations : on criera que nous voulons faire du parti
socialiste un ordre d’« orthodoxes », persécutant les «hé
rétiques » qui s’écartent du « dogme », qui ont une opinion
indépendante, etc. Nous les connaissons, toutes ces phrases
cinglantes à la mode. Mais elles ne contiennent pas un grain
de sens ni de vérité. Il ne saurait exister de parti socialiste
fort sans une théorie révolutionnaire qui unisse tous les
socialistes, d’où ils tirent toutes leurs convictions et qu’ils
appliquent à leurs méthodes de lutte et à leurs moyens
d’action. Défendre une telle théorie que l’on consi
dère comme profondément vraie, contre les attaques injus
tifiées et les tentatives de l’altérer ne signifie nul
lement qu’on soit l’ennemi de toute critique. Nous ne
tenons nullement la doctrine de Marx pour quelque chose
d’achevé et d’intangible ; au contraire, nous sommes per-