☭ Lénine : Œuvres complètes informatisées

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Page 93 · vol. 4

peupler les originaires du vieux pays, en partie occupés
par des peuplades restées en dehors du marché mondial
et du capitalisme mondial). Le premier aspect pourrait
être qualifié de développement du capitalisme en profon
deur, et le second de développement du capitalisme en lar
geur*. Une telle distinction engloberait tout le processus
de l’évolution historique du capitalisme : d’une part, dans
les vieux pays qui ont élaboré au cours des siècles les diver
ses formes des rapports capitalistes jusqu’à la grande in
dustrie mécanique inclusivement ; d’autre part, la puis
sante tendance qui pousse le capitalisme évolué à gagner
d’autres territoires, à peupler et mettre en valeur de nou
velles parties du monde, à fonder des colonies, à entraîner
les peuplades sauvages dans le tourbillon du capitalisme
mondial. En Russie, cette dernière tendance du capitalisme
s’est exprimée et continue à s’exprimer d’une façon parti
culièrement accusée aux confins de notre pays, ces régions
dont la colonisation a reçu une impulsion si considérable
après la réforme, dans la période capitaliste de l’histoire
russe. Le Sud et le Sud-Est do la Russie d’Europe, le Cau
case, l’Asie centrale, la Sibérie servent pour ainsi dire de
colonies au capitalisme russe et lui assurent un gigantesque
essor non seulement en profondeur, mais aussi en largeur.

Enfin, la distinction proposée est commode du fait
qu’elle circonscrit nettement le domaine envisagé par la
théorie de la réalisation. Il est clair que cette dernière se
rapporte seulement au premier aspect, au développement
du capitalisme en profondeur. Cette théorie (c’est-à-dire
celle qui explique le processus de la reproduction et de la
circulation du capital social dans son ensemble) doit néces
sairement considérer pour ses analyses une société capita
liste repliée sur elle-même, c’est-à-dire faire abstraction
de l’extension du capitalisme à d’autres pays, de l’échange
de marchandises entre un pays et un autre, parce que ce
processus n’apporte rien à la solution du problème de la
réalisation, et ne fait que déplacer la question en l’appli
* Il va de soi que, pratiquement, les deux aspects sont étroite
ment mêlés, et que leur séparation est une pure abstraction, un sim
ple procédé adopté pour l’étude d’un processus complexe. Mon ouvrage
mentionné ci-dessus est consacré exclusivement au premier de ces
aspects : voir dans ce livre le chap. VIII, paragraphe V.