Volume 04 pages 34-35
ces ouvriers par province et par industrie comme le fait
M. Karychev, qui va jusqu’à tracer un diagramme. Ces
chiffres n’ont rien à voir avec le volume du travail à domicile
pour des capitalistes (dont la détermination n’est possible
que si l’on possède un inventaire complet de l’industrie,
comprenant tous les magasins et autres établissements
ou les particuliers distribuant du travail à domicile) ; ils
permettent simplement de différencier les ouvriers em
ployés dans les établissements, c’est-à-dire les ouvriers
de fabrique proprement dits, de ceux qui travaillent au
dehors. Jusqu’à présent, ces catégories étaient très souvent
confondues : même dans VIndex pour 1890, on trouve à plu
sieurs reprises des exemples de cette confusion. A présent,
dans la Liste, on fait une première tentative pour y mettre
fin.
Les chiffres de la Liste touchant la production annuelle
des fabriques ont été dépouillés par M. Karychev dé façon
plus satisfaisante, surtout parce que l’auteur a enfin adopté
ici un groupement des fabriques suivant l’importance de
leur production au lieu de prendre les « moyennes » habi
tuelles. A la vérité, il ne parvient pas, malgré tout, à échap
per à ces « moyennes » (importance de la production par
fabrique), et compare même celles de 1894-95 à celles de
1885 —- procédé absolument inopérant, comme nous l’avons
vu plus d’une fois. Remarquons que les chiffres d’ensemble
relatifs à la production annuelle des fabriques sont infini
ment plus sûrs que ceux ayant trait au nombre des fabri
ques, pour la raison déjà indiquée du faible rôle joué par
les petits établissements. Par exemple, selon la Liste, il
existe en tout dans la Russie d’Europe 245 fabriques dont
la production dépasse un million de roubles, soit 1,9% du
nombre total, mais elles concentrent 45,6% de la produc
tion annuelle de toutes les fabriques de la Russie d’Europe
(Karychev, p. 38), alors que celles dont la production est
inférieure à 5 000 r. représentent 3O,8°/o de l’ensemble des
établissements industriels mais fournissent seulement 0,6%
de la production totale, soit une part tout à fait insignifiante.
J1 faut cependant faire cette réserve que, dans ces calculs,
M. Karychev perd de vue la différence entre la valeur de la
production et les sommes payées pour le traitement des ma
tières premières. Cette très importante distinction est in-
troduite pour la première fois dans notre statistique des
fabriques et des usines par la Liste *. On comprend qu’il
soit absolument impossible de comparer ces deux gran
deurs et qu’il convenait de les séparer. M. Karycbev
ne le fait pas, et il est permis de présumer que ce faible pour
centage de la production annuelle des petits établissements
résulte en partie de ce qu’on a inclus des entreprises qui
ont indiqué non la valeur des produits traités, mais seule
ment les sommes payées pour leur traitement. Nous citerons
ci-après un exemple d’erreur commise par M. Karychev pour
avoir méconnu cette distinction. Cette dernière, établie
par la Liste entre les sommes payées pour le traitement des
matières premières et la valeur du produit, et aussi l’omis
sion de l’accise dans le prix de production, font que les
chiffres de la Liste no peuvent être comparés à ceux des pu
blications antérieures. D’après ce document, la production
de toutes les fabriques de la Russie d’Europe représente
1 345 millions de roubles et d’après VIndex pour 1890,
1 501 millions. Mais si on retranchait du second chiffre
le montant de l’accise (environ 250 millions de roubles pour
la seule production des distilleries), le premier chiffre se
rait nettement supérieur.
Dans l’Index (2e et 3e éditions), on répartissait les
fabriques et les usines en groupes selon l’importance de la
production annuelle (sans indiquer la part de chaque groupe
dans la production totale), mais cette répartition ne peut
être comparée aux données de la Liste, par suite des diffé
rences signalées ci-dessus dans les procédés de recensement
et dans la façon de déterminer la valeur de la production
annuelle.
Il nous reste encore à examiner un raisonnement erroné
de M. Karychev. Pour ce qui est de la valeur globale de la
* Toutefois, rien ne nous garantit malheureusement que la Liste
a établi cette distinction avec rigueur et esprit de suite ; nous voulons
dire que la valeur du produit n’a été indiquée que pour les fabriques
qui vendent réellement leur production, et les sommes payées pour le
traitement des matières premières seulement pour celles qui traitent
des matières premières fournies de l’extérieur. Il est possible, par
exemple, que dans la meunerie (c’est là qu’on rencontre le plus fré
quemment la distinction indiquée) les patrons aient indiqué tout à fait
au hasard tantôt l’un, tantôt l’autre des deux chiffres. Cette question
devrait être examinée spécialement.
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