Volume 04 pages 26-27
globale de la production des « fabriques et usines » officiel
lement recensées. On nous fera peut-être remarquer que, s’il
se produit une concentration industrielle, c’est que les gran
des entreprises évincent les petites et que le nombre de ces
dernières diminue, ainsi que, par conséquent, le nombre
total des établissements. Seulement, d’abord, cette der
nière conclusion ne s’applique plus aux « fabriques et usi
nes » mais à U ensemble des entreprises industrielles, dont
nous n’avons pas le droit de parler, car nous ne possédons
pas la moindre statistique tant soit peu digne de foi et com
plète sur les établissements industriels. Et puis, même d’un
point de vue purement théorique, on ne saurait dire a priori
que, dans une société capitaliste en voie de développement,
il doive toujours et à coup sûr y avoir réduction du nombre
des établissements industriels vu que, parallèlement au
processus de concentration de l’industrie, la population
paysanne se détache de l’agriculture, les petits établisse
ments se multiplient dans les régions retardataires du pays
par suite de la désagrégation do l’exploitation paysanne
semi-naturelle, etc. *
Revenons à M. Karychev. C’est tout juste s’il n’accorde
pas le maximum d’attention aux données les moins sûres
(concernant précisément le nombre des « fabriques et usi
nes »). Il répartit les provinces en groupes selon le nombre
des « fabriques », dessine un diagramme où il reporte ces
groupes, et dresse un tableau spécial des provinces ayant
le plus grand nombre de « fabriques » pour chaque indus
trie (pp. 16 et 17) ; il calcule une quantité de pourcentages
indiquant le nombre des fabriques par province par rapport
au nombre total des fabriques (pp. 12-15). Ce faisant,
M. Karychev a négligé une vétille: il a oublié de se deman
der si les nombres des fabriques dans les différentes provinces
sont comparables. Cette question doit être tranchée par la
négative et, de ce fait, la plus grande partie des calculs,
des comparaisons et des raisonnements de M. Karychev se
réduit à d’innocents exercices de statistique. Si M. le pro
* Par exemple, le « recensement des artisans » pour 1894-95
dans la province de Perm a montré que, depuis la réforme, il se crée
sans cesse dans les campagnes un nombre toujours croissant de petites
entreprises industrielles, voir Y Etude sur la région de Perm. Essai
sur Vêlai de l'industrie artisanale dans la province de Perm. Perm 1896.
fesseur avait pris connaissance de la définition des « fabri
ques et usines » selon la circulaire du 7 juin 1895, il aurait
aisément soupçonné qu’une définition aussi peu claire ne
pouvait pas être appliquée d’une façon identique dans les
différentes provinces, et il aurait pu être amené à cette même
conclusion s’il avait pris connaissance plus attentivement
de la Liste elle-même. Citons quelques exemples. D’après
le nombre des établissements industriels, dans la section
XI (traitement des produits alimentaires ; c’est dans ce
groupe que le nombre des fabriques est le plus considérable),
M. Karychev classe en tête les provinces de Voronèje, de
Viatka et de Vladimir (p. 12). Mais l’abondance des « fa
briques et usines » dans ces provinces s’explique avant tout
par une circonstance purement fortuite, par le fait qu’on y a
recensé de petites entreprises dont il n’a pas été tenu compte
dans les autres provinces. Par exemple, dans celle de Voro
nèje, il s’est trouvé de nombreuses « usines » tout simple
ment parce qu’on y a enregistré les petits moulins (sur 124
moulins, il y en a seulement 27 à vapeur et un grand nombre
à eau avec 1, 2, 3 roues. Dans les autres provinces, ce genre
de moulins n’était pas compté ; du reste, il aurait été impos
sible de les dénombrer complètement) et les petites huile
ries (en majorité mues par des chevaux), contrairement à
ce qui s’est fait ailleurs. Dans la province de Viatka, sur
116 moulins, il n’y en a que 3 à vapeur ; dans celle de Vla
dimir on a enregistré une dizaine de moulins à vent et 168
huileries, dont une grande partie est mue par le vent, par un
cheval ou à la main. S’il y a moins d’établissements indus
triels dans les autres provinces, cela ne signifie nullement
qu’il ne s’y trouve pas de moulins à vent, de petits moulins
à eau, etc. Tout simplement on ne les a pas comptés. Dans
bien des provinces, on a enregistré presque uniquement les
moulins à vapeur (provinces de Bessarabie, d’Ekatérinoslav,
de Tauride, de Kherson, etc.); quant à la production meuniè
re, elle est représentée par 2 308 « fabriques » sur les 6 233
existant en Russie d’Europe dans la section XI. Il était
absurde de parler de la répartition des fabriques par province
sans avoir tiré au clair le caractère disparate des données.
Prenons la section IX, le traitement des produits minéraux.
Voici, par exemple, 96 briqueteries, dans la province de
Vladimir, et 31 dans la province du Don, soit moins du tiers.