☭ Lénine : Œuvres complètes informatisées

| Éditions Communistus

Volume 04 pages 20-21

employant de 1 à 3 ouvriers et dont la production s’éche
lonne entre 15 et 300 r. (p. 995 et passùri). Avec de tels
procédés, on pourrait en arriver à cette «statistique» pro
posée dans les années 60 par le fameux Recueil slatistique
militaire, qui totalisait dans la Russie d’Europe 3 086 «usi
nes » de goudron et de poix, dont 1 450 dans la province
d’Arkhangelsk (avec 4 202 ouvriers et une production évaluée
à 156 274 r., soit en moyenne moins de 3 ouvriers et un peu
plus de 100 r. par « usine »). Comme par un fait exprès, c’est
précisément la province d’Arkhangelsk qui fait complète
ment défaut dans la Liste en ce qui concerne cette section :
il faut croire que désormais les paysans n’y distillent plus
de goudron et ne fabriquent plus de poix ! Remarquons que
tous ce§ exemples se rapportent à des établissements qui ne
répondent pas aux définitions de la circulaire du 7 juin 1895.

Aussi, leur recensement est-il purement fortuit : dans certaines
provinces (peut-être même dans certains districts) on les a
comptés, dans la plupart on les a omis. D’après une statis
tique antérieure (celle de 1885), do telles entreprises
avec une production valant moins de 1 000 r. étaient
exclues.

N’ayant absolument rien compris à cette question essen
tielle do la statistique des fabriques et des usines, M. Kary
chev ne s’est cependant pas gêné pour tirer dos « conclu
sions » des chiffres obtenus par lui après dépouillement.

Il affirme d’abord que le nombre des fabriques on Russie
diminue (p. 4 et passinï). Pour parvenir à cette conclusion,
M. Karychev a tout simplement pris Je nombre des fabriques
en 1885 d’après les données fournies par le département
du Commerce et des Manufactures (17 014) et en a soustrait
le nombre des fabriques en Russie d’Europe d’après la Lis
te (14 578). Il obtient une diminution de 14,3%: AI. le profes
seur va jusqu’à calculer le pourcentage, sans se laisser trou
bler par le fait que les chiffres de 1885 ne comprennent pas
les usines soumises à l’accise; il se borne à noter que l'adjonc
tion de ces établissements accentuerait la « réduction »
du nombre des fabriques. Et l’auteur entreprend d’exami
ner dans quelle partie de la Russie cette « réduction du
nombre des établissements » (p. 5) s’opère « le plus rapide
ment ». En réalité, il ne se produit aucune réduction : le nombre
des fabriques en Russie ne diminue pas, mais augmente, et

la conclusion forgée de toutes pièces par M. Karychev
sulte du fait que le savant professeur compare des données
nullement comparables *. Et cette impossibilité de com
parer ne tient nullement à l’absence, pour 1885, de chiffres
concernant les usines soumises à l’accise. M. Karychev
aurait pu se référer à des chiffres englobant les usines de cet
te catégorie (en les tirant de Y Index déjà cité d’Orlov, éta
bli d’après les mêmes états du département du Commerce
et des Manufactures) ; il aurait ainsi fixé : le nombre des
« fabriques » dans la Russie d’Europe à 27 986 pour 1879,
27 235 pour 1884, 21 124 pour 1890, et la « réduction » en
1894-95 (14 578) paraîtrait infiniment plus élevée. Le
malheur est que tous ces chiffres ne se prêtent pas à la com
paraison, parce que la notion de « fabrique » n’est pas iden
tique dans les publications anciennes et les publications
actuelles, et aussi parce qu’on fait figurer parmi les « fabri
ques », au petit bonheur (pour certaines provinces et pour
certaines années), de minuscules établissements qu’il serait
ridicule de vouloir recenser entièrement avec les moyens
dont dispose notre statistique. Si, par exemple, M. Ka
rychev s’était donné la peine d’analyser la notion de « fabri
que » telle que la Liste la définit, il aurait vu que, pour
comparer le nombre des fabriques indiqué dans cette édition
à celui des autres éditions, il est indispensable de considé
rer seulement les entreprises employant 15 ouvriers ou plus,
vu que les établissements de ce genre sont les seuls à avoir
été recensés sans aucune restriction par la Liste pour toutes
les provinces et toutes les industries. Comme il s’agit en
l’occurrence d’entreprises relativement importantes, leur
recensement est le plus satisfaisant, dans les éditions an
ciennes également. Apres nous être assuré que les don
nées que nous comparons sont effectivement comparables
calculons le nombre des fabriques employant 16 ouvriers
* En 1889, M. Karychev se servait (louriditcheski Vestnik n° 9)
des données empruntées aux rapports adressés au tsar par MM. les
gouverneurs, relatives à l’année 1885, comprenant des milliers de
minuscules moulins, huileries, briqueteries, poteries, tanneries,
mégisseries et autres ateliers d’artisans, et il fixait le nombre des « fa
briques » dans la Russie d’Europe à 62 801 1 On s’étonne qu’il n’ait
pas calculé le pourcentage de « réduction » actuelle du nombre des
fabriques, par rapport à ce chiffre.