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heurs, les ouvriers méprisent ceux qui lâchent leurs ca
marades et qui composent avec le patron. Malgré les misères
causées par la grève, les ouvriers des fabriques voisines
éprouvent toujours un regain de courage à la vue de leurs
camarades qui ont engagé la lutte. «Ceux qui supportent
tant de misères pour briser la résistance d’un seul bourgeois
sauront briser la résistance de la bourgeoisie tout entière»113,
a dit un des grands maîtres du socialisme, Engels, à propos
des grèves des ouvriers anglais. 11 suffit souvent qu’une seule
fabrique se mette en grève pour que le mouvement gagne
aussitôt une foule d’autres entreprises. Tant est grande l’in
fluence morale des grèves, tant est contagieux pour les ouvriers
le spectacle de leurs camarades qui, ne fût-ce que momen
tanément, cessent d’être des esclaves pour devenir les égaux
des riches! Toute grève contribue puissamment à orienter
les ouvriers vers l’idée du socialisme, de la lutte menée par
la classe ouvrière tout entière pour s’affranchir du joug du
capital. 11 est arrivé très souvent qu’avant une grève impor
tante, les ouvriers d’une fabrique, d’une industrie, d’une ville
donnée ne savaient presque rien du socialisme et n’y pensaient
guère, mais qu’après la grève, les cercles et les associations se
multipliaient parmi eux, tandis qu’un nombre sans cesse
grandissant d’ouvriers devenaient socialistes.
La grève aide les ouvriers à prendre conscience de leur
propre lorce et de celle des patrons elle les habitue à
penser non pas seulement à leur propre patron et à leurs
camarades les plus proches, mais à tous les patrons, à
toute la classe des capitalistes et à toute la classe ouvrière.
Lorsqu’un fabricant, qui a amassé des millions grâce au
labeur de plusieurs générations d’ouvriers, refuse la moin
dre majoration de salaire ou tente meme de le réduire en
core plus et, en cas de résistance, jette sur le pavé des mil
liers de familles affamées, les ouvriers voient clairement
que la classe capitaliste dans son ensemble est l’ennemie
de la classe ouvrière dans son ensemble, qu’ils ne peuvent
compter que sur eux-mêmes et leur union. Il arrive très
souvent que le patron s’emploie de son mieux à tromper
les ouvriers, à se faire passer pour leur bienfaiteur, à dis
simuler son exploitation des ouvriers par une aumône
dérisoire, par des promesses fallacieuses. Chaque grève
détruit toujours, d’un coup, tout ce mensonge ; elle mon-