☭ Lénine : Œuvres complètes informatisées

| Éditions Communistus

Volume 04 pages 242-243

venir la caractéristique de la lutte de classe du prolétariat :
il faut en indiquer l’objet (tous les moyens de production
deviendront propriété sociale et la production socialiste
sera substituée à la production capitaliste), le caractère
international du mouvement ouvrier, le caractère politique
de la lutte de classe et son but immédiat (conquête de la
liberté politique). Il importe expressément de souligner
que le combat livré à l’autocratie pour les libertés politi
ques est la première tâche politique du parti ouvrier ;
mais pour expliquer celle-ci on doit, selon nous, définir
le caractère de classe de l’absolutisme russe actuel et la
nécessité de le renverser, dans l’intérêt non seulement de
la classe ouvrière, mais aussi du développement social
tout entier. Cette indication est nécessaire sous l’angle
théorique, car, du point de vue des idées fondamentales
du marxisme, les intérêts du progrès social sont supérieurs
à ceux du prolétariat, les intérêts du mouvement ouvrier
dans son ensemble l’emportent sur ceux de telle ou telle
couche d’ouvriers ou de toiles ou telles étapes du
mouvement ; elle l’est également au point de vue prati
que, pour définir le point central auquel doit aboutir et
autour duquel doit s’exercer toute l’activité multiple de
la social-démocratie, qui consiste dans la propagande,
l’agitation et l’organisation. Nous estimons nécessaire
de consacrer en outre un paragraphe spécial du programme
à cette indication que le parti ouvrier social-démocrate
s’assigne pour tâche de soutenir tout mouvement révolu
tionnaire contre l’absolutisme et de lutter contre toute
tentative du gouvernement autocratique pour corrompre
et obscurcir la conscience politique du peuple par une
tutelle bureaucratique et des aumônes illusoires, par cette
politique de démagogie que nos camarades allemands ont
appelée Peitsche und Zuckerbrot (fouet et pain d’épice).

Le pain d’épice, ce sont les aumônes à ceux qui, en échange
d’améliorations partielles apportées par-ci, par-là à leur
situation matérielle, renoncent à leurs revendications poli
tiques et demeurent les esclaves dociles de l’arbitraire po
licier (des foyers, etc., pour les étudiants ; pour les ouvriers,
il suffit de rappeler les proclamations de Witte, ministre
des Finances, lors des grèves de Saint-Pétersbourg en 1896
et 1897, ou bien les discours en faveur des ouvriers, pro-

noncés par les membres du ministère de l’intérieur, en com
mission, lors de la promulgation de la loi du 2 juin 1897).

Le fouet, c’est la répression redoublée contre ceux qui,
malgré ces aumônes, continuent à combattre pour la liberté
politique (mobilisation des étudiants dans l’armée92; cir
culaire du 12 août 1897 sur la déportation des ouvriers en
Sibérie ; répression accentuée contre la social-démocratie,
etc.). Le pain d’épice sert à attirer les faibles, à les cor
rompre et les dépraver ; le fouet sert à intimider et « neu
traliser >> les combattants honnêtes et conscients de la
cause ouvrière et de la cause du peuple. Tant que l’absolu
tisme subsiste (et nous devons maintenant établir notre
programme en tenant compte de l’existence de l’absolu
tisme, car sa chute entraînera infailliblement un si grand
changement dans les conditions politiques que le parti
ouvrier sera obligé de changer sensiblement la formulation
de ses objectifs politiques immédiats), il faut s’attendre
à voir le gouvernement renouveler et renforcer sans cesse
ces mesures démagogiques. Nous devons donc mener contre
elles une lutte systématique, en démasquant l’hypocrisie
des zélateurs policiers du peuple, en montrant le lien entre
les réformes gouvernementales et la lutte ouvrière, en
apprenant au prolétariat à profiter de chaque réforme pour
consolider sa position de combat, pour élargir et intensifier
le mouvement ouvrier. Il est indispensable, d’autre part,
d’indiquer dans le programme la nécessité de soutenir tous
ceux qui combattent l’absolutisme, car la social-démocra
tie russe, indissolublement fusionnée avec les éléments avan
cés de la classe ouvrière russe, doit arborer le drapeau des
revendications démocratiques générales, afin de grouper autour
d’elle toutes les couches et tous les éléments susceptibles
de lutter pour la liberté politique ou, tout au moins, d’ap
puyer cette lutte de quelque manière que ce soit.

Tel est notre point de vue sur ce que doit être l’expo
des principes de notre programme, et sur les thèses fon
damentales qu’il importe d’y exprimer avec le maximum
de précision et de relief. Le projet de programme du groupe
« Libération du Travail » doit, selon nous, éliminer (dans
l’exposé des principes) 1° les indications concernant la
forme de la propriété paysanne (nous reviendrons plus loin
sur la question paysanne) ; 2° les indications touchant les