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combattraient avec la « participation » des marxistes pour
des « formes juridiques ». La réalisation d’un tel programme
équivaudrait à un suicide politique de la social-démocratie
russe, à un freinage et un avilissement considérables du
mouvement ouvrier russe et du mouvement révolutionnaire
russe (ces deux notions se confondent à nos yeux). L’appa
rition d’un tel programme, à elle seule, montre combien
étaient fondées les craintes d’un des militants d’avant-garde
de la social-démocratie russe, P. Axelrod, lorsqu’il écrivait
ce qui suit à la fin de 1897, à propos de l’éventualité d’une
telle perspective :
« Le mouvement ouvrier ne dépasse pas le cadre étroit des col
lisions purement économiques entre ouvriers et entrepreneurs et, par
lui-même, pris dans son ensemble, il n’a pas de caractère politique ;
par contre, dans la lutte pour la liberté politique, les couches avan
cées du prolétariat suivent les cercles et fractions révolutionnaires
appartenant à ce qu’on appelle rintelligucntsia » (Axelrod. A pro
pos des tâches et de la tactique actuelles des social-démocrates russes. Ge
nève 1898, p. 19)
Les social-démocrates russes doivent déclarer une guer
re à outrance à tout l’ensemble d’idées exprimées dans le
« credo », car elles conduisent directement à la réalisation
de cette perspective. Les social-démocrates russes doivent
déployer tous leurs efforts en vue de réaliser une autre pers
pective, exposée par P. Axelrod en ces termes :
« Autre perspective : la social-démocratie organise le proléta
riat russe en un parti politique indépendant, luttant pour la liberté,
en partie aux côtés des fractions révolutionnaires bourgeoises (pour
autant qu’il s’en trouvera) et en alliance avec elles, en partie en atti
rant ouvertement dans ses rangs ou en entraînant à sa suite les éléments
intellectuels les plus attachés au peuple et les plus révolutionnaires »
(ibid., p. 20).
A l’époque même où P. Axelrod écrivait ces lignes, les
déclarations des social-démocrates de Russie montraient
clairement que l’immense majorité d’entre eux partageaient
ce point de vue. Il est vrai qu’un journal des ouvriers de
Pétersbourg, la Rabotchdia Mysl*2, sembla pencher vers les
idées des auteurs du « credo », en exprimant malheureuse
ment, dans un éditorial à caractère de programme (n° 1, oc
tobre 1897), cette thèse absolument erronée et contraire à
la doctrine social-démocrate que la « base économique du
mouvement » peut être « obscurcie par le désir constant