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nier complètement toute connexion entre eux, il affirmera
possible la réalisation des moyens de production absolu
ment indépendants des biens de consommation, même « en
fin de compte », — et il aboutira inévitablement à une con
clusion absurde, ou bien il reconnaîtra à la suite de Marx
qu ’en dernière instance les moyens de production sont liés aux
biens de consommation, — et il sera alors contraint d’avouer
la justesse de mon interprétation de la théorie de Marx.
Je prendrai un exemple pour illustrer, en guise de con
clusion, les raisonnements abstraits par des données con
crètes. On sait que, dans toute société capitaliste, l’emploi
des machines est souvent entravé par les salaires extrême
ment bas ( = faible niveau de consommation des masses popu
laires). Bien plus : il arrive même parfois que des machines
acquises par les entrepreneurs ne soient pas utilisées, parce
que le prix de la main-d’œuvre tombe si bas que leur pro
priétaire trouve plus avantageux de recourir au travail ma
nuel 1* L’existence d’une contradiction entre la consomma
tion et la production, entre la tendance du capitalisme à
un développement illimité des forces productives et la
limitation de cette tendance par la prolétarisation, la
misère et le chômage du peuple, est dans ce cas claire com
me le jour. Mais il est non moins clair que la seule et unique
conclusion juste à tirer de cette contradiction est que
l’essor des forces productives doit lui-même entraîner in
vinciblement la substitution au capitalisme d’une éco
nomie où les producteurs seront associés. Au contraire,
il serait complètement erroné de conclure, à partir de cet
te contradiction, que le capitalisme doit fournir sijsléma
tiquement un produit excédentaire, c’est-à-dire qu’il est
totalement incapable de réaliser sa production, qu’il ne
peut donc jouer un rôle historiquement progressif, etc.
Rédigé en mai 1899 Conforme au texte de la revue
Publié en décembre 1899 dans la
revue • Jizn*>
Signeé Vladimir I line
* J ’ai cité un exemple de ce dernier phénomène emprunté à l’agri
culture capitaliste russe dans Le développement du capitalisme en
Russie, p. 165 (voir V. Lénine, Œuvres, tome 3.—N.R.). Loin d’être
isolés les faits de ce genre sont la conséquence habituelle et nécessaire
des traits fondamentaux du capitalisme.