Volume 04 pages 148-149
ait cessé de se manifester dans ce pays. De 1882 à 1895, le
nombre global des exploitations agricoles a augmenté de
281 000. Sur ce total, une part énorme revient à la multi
plication des exploitations prolétarisées allant jusqu’à
un hectare. Leur nombre s’est accru de 206 000.
«Comme nous le voyons, le mouvement de l’agricul
ture revêt un caractère tout à fait particulier et est complè
tement diflérent de celui du capital industriel et commer
cial. Nous avons indiqué dans le chapitre précédent que
dans l’agriculture, la tendance à la centralisation des
exploitations n’entraîne pas une disparition entière de la
petite production. Quand elle va trop loin, elle engendre
l’orientation opposée, si bien que la tendance à la cen
tralisation et celle au morcellement se succèdent tour à
tour. Nous constatons à présent que l’une et l’autre peu
vent aussi se manifester parallèlement. On voit croître le
nombre des fermes dont les détenteurs se présentent sur
le marché en tant que prolétaires, en tant que vendeurs
de force de travail... Les intérêts essentiels do ces petits
exploitants agricoles, comme vendeurs do cette marchan
dise qu’est la force de travail, se conlondent avec ceux du
prolétariat industriel, et leur propriété n’engendre pas chez
eux d’antagonisme à l’égard de ce dernier. Avoir une terre
à soi émancipe plus ou moins le paysan parcellaire vis-à
vis du marchand de produits alimentaires, mais cela ne le
libère pas de l’exploitation par les entrepreneurs capita
listes, que ceux-ci relèvent do l’industrie ou de l’agricul
ture (S. 174). »
Dans l’article suivant, nous terminerons l’exposé du
livre de Kautsky et porterons sur lui un jugement d’ensem
ble, tout en examinant, chemin faisant, les objections
présentées par M. Boulgakov dans son second article.
DEUXIEME ARTLCLE
I
Dans le chapitre IX de son livre (« Difficultés crois
santes do l’agriculture marchande»), Kautsky aborde
l’analyse des contradictions propres à l’agriculture capi
taliste. Les objections que M. Boulgakov adresse à ce cha
pitre, et que nous examinerons ci-après, montrent que le
critique n’a pas très exactement compris la signification
générale do ces « difficultés ». 11 en est qui, tout en cons
tituant un « obstacle » au développement intégral d’une
agriculture rationnelle, donnent en même temps une im
pulsion a l'essor de l’agriculture capitaliste. Par exemple.
au nombre des « difficultés », Kautsky signale l’exode
rural. 11 est incontestable que lorsque les meilleurs, les
plus capables des travailleurs, abandonnent leurs villages,
c’est un « obstacle » au développement intégral d’une
agriculture rationnelle, mais il est non moins indéniable
que les exploitants agricoles luttent contre cet obstacle
en faisant progresser la technique, c’est-à-dire en introdui
sant des machines.
Kautsky étudie les « difficultés » suivantes : a) la rente
foncière, b) la législation sur l’héritage, c) les restric
tions au droit d’héritage, les majorats (iidéicommis, Aner
benrecht) 49, d) l’exploitation de la campagne par la ville,
e) la dépopulation des campagnes.
La rente foncière est la partie de la plus-value qui
subsiste après déduction du profit moyen correspondant au
capital investi dans l’exploitation. Le monopole de la pro
priété du sol permet à son détenteur de s’approprier cet
excédent, et le prix de la terre (=la rente capitalisée)