☭ Lénine : Œuvres complètes informatisées

| Éditions Communistus

Page 141 · vol. 4

la terre est « très souvent » (??) travaillée à la bêche « avec
une incroyable intensité » encore que... « la dépense de
main-d’œuvre soit tout à fait irrationnelle». 11 va de soi
que cette objection est dénuée de tout fondement, et que
des exemples isolés d’excellente mise en valeur du sol
par le petit paysan sont tout aussi peu capables de réfuter
la caractéristique générale donnée par Kautsky pour ce
type d’exploitations que l’exemple cité plus haut de la
rentabilité supérieure d’une petite exploitation ne saurait
démentir la thèse de la supériorité de la grande production.

Que Kautsky ait pleinement raison de qualiiier dans
l'ensemble * ces exploitations de prolétariennes, c’est
ce qui ressort clairement du lait, mis en lumière par le re
censement allemand de 1895, qu’une foule de petites fer
mes ne se tire pas d’affaire sans des gains d’appoint. Sur
les 4 700 000 personnes qui sont des agriculteurs indépen
dants, 2 700 000, soit 57%, ont des gains d’appoint. Sur
3 200 000 exploitations de moins de 2 hectares, 400 000
seulement, c’est-à-dire 73%, n’ont pas de gains d’appoint !

Dans toute l’Allemagne, sur 5 500 000 exploitations
agricoles, 1 500 000 appartiennent à des ouvriers salariés
agricoles ou industriels (il faut y ajouter 704 000 apparte
nant à des artisans). Après cela, NI. Boulgakov prétend
que la théorie de la petite exploitation prolétarisée a été
« échafaudée » par Kautsky ! ** Les formes de prolétarisa
* Nous soulignons «dans l’ensemble », parce qu’on ne peut évi
demment pas nier que, dans certains cas, même ces exploitations qui
disposent d’une étendue de terre minime peuvent donner beaucoup
de produits et de revenus (vignobles, cultures maraîchères, etc.).

Mais que diriez-vous d’un économiste qui entreprendrait de réfuter
un argument invoquant le manque de chevaux parmi les paysans
russes en se référant, par exemple, aux maraîchers de la banlieue de
Moscou qui, même sans disposer d’un cheval, peuvent parfois organi
ser une exploitation rationnelle et rentable?

** Dans une note de la page 15, M. Boulgakov dit que Kautsky
répète l’erreur commise par les auteurs d’un livre sur les prix du blé47
lorsque ces derniers affirment que l’immense majorité de la popula
tion rurale n’a pas intérêt à l’etablissement de droits de douane sur
le blé. Encore une opinion avec laquelle nous ne pouvons pas être
d’accord. Ces auteurs ont commis de nombreuses erreurs (plus d’une
fois relevées par moi dans le livre cité ci-dessus), mais pas en recon
naissant que la majorité de la population n’a pas intérêt à maintenir
des prix élevés sur le blé. Ils ont seulement tort d’en déduire directe
ment que l’intérêt de la masse est aussi celui de tout le développement