☭ Lénine : Œuvres complètes informatisées

| Éditions Communistus

Volume 04 pages 184-185

de ne pas oublier l’idéal politique ». Mais en même temps
un autre journal des ouvriers de Pétersbourg, Sankt-Péters
bourgski Rabotchi Listok33 (n° 2, septembre 1897), déclara
résolument que « seul un parti ouvrier nombreux et for
tement organisé pouvait... renverser l’autocratie », que les
ouvriers « organisés en un parti puissant » « se libére
raient eux-mêmes et libéreraient toute la Russie de toute
oppression politique et économique ». Un troisième journal,
la Rabotchdia Gazéta31, écrivit dans l’éditorial de son
n° 2 (novembre 1897) : « La lutte contre le gouvernement
autocratique pour la liberté politique est l’objectif immé
diat du mouvement ouvrier russe. » — « Le mouvement
ouvrier russe décuplera ses forces s’il intervient comme un
seul bloc cohérent, sous le même nom et avec une organi
sation solide... » « Les cercles ouvriers isolés doivent se
transformer en un seul parti. » « Le parti ouvrier russe sera
un parti social-démocrate. » Ce qui prouve que l’immense
majorité des social-démocrates russes partageait entière
ment les vues de la Rabotchdia Gazéta, c’est que le congrès
des social-démocrates russes65, réuni au printemps 1898, for
ma le «Parti ouvrier social-démocrate de Russie », publia un
manifeste au nom de ce parti et reconnut la Rabotchdia
Gazéta comme son organe officiel. Ainsi, les auteurs du
« credo » font un pas énorme en arrière, par rapport au degré
de développement déjà atteint par la social-démocratie rus
se et sanctionné dans le Manifeste du Parti ouvrier social-dé
mocrate de Russie. Si, à la suite de la féroce répression
clenchée par le gouvernement russe, l’activité du Parti s’est,
à l’heure actuelle, momentanément affaiblie et si son organe
officiel a cessé de paraître, la tâche de tous les social-dé
mocrates russes est de déployer tous les efforts en vue de
consolider définitivement le Parti, élaborer son programme
et faire revivre son organe officiel. Etant donné le flotte
ment idéologique attesté par le fait que des programmes
comme le « credo » analysé ci-dessus ont pu voir le jour,
nous estimons particulièrement nécessaire de souligner les
principes fondamentaux exposés dans le Manifeste et
qui sont d’une énorme importance pour la social-démocratie
russe. Premièrement : la social-démocratie russe « veut être
et rester un mouvement de classe des masses ouvrières or
ganisées ». Il en découle que la devise de la social-dé mocra-

tie doit être : prêter concours aux ouvriers non seulement
dans la lutte économique, mais aussi dans la lutte politique ;
l’agitation, non seulement sur le terrain des revendications
économiques immédiates, mais aussi en liaison avec toutes
les manifestations de l’oppression politique ; la pro
pagande, non seulement des idées du socialisme scien
tifique, mais aussi des idées démocratiques. Seule, la théo
rie du marxisme révolutionnaire peut être le drapeau du
mouvement de classe des ouvriers, et la social-démocratie
russe doit veiller à la développer et à la mettre en pratique,
tout en la protégeant contre les déformations et les avilis
sements auxquels sont si souvent en butte les « théories à
la mode » (or, les succès de la social-démocratie révolution
naire en Russie ont déjà fait du marxisme une théorie « à
la mode »). Eu concentrant actuellement toute son action
parmi les ouvriers des usines, des fabriques et des mines, la
social-démocratie ne doit pas oublier qu’avec l’extension du
mouvement, les masses laborieuses qu’elle organise doivent
aussi englober dans leurs rangs les ouvriers à domicile,
les artisans, les ouvriers agricoles et les millions de paysans
ruinés et mourant de faim.

Deuxièmement : « L’ouvrier russe doit porter et portera
jusqu’au bout sur ses fortes épaules la cause de la conquête
de la liberté politique. » En s’assignant comme tâche im
médiate le renversement de l’absolutisme, la social-démo
cratie doit intervenir comme un combattant d’avant-garde
dans la lutte pour la démocratie, et est tenue, ne serait-ce que
pour cette seule raison, d’appuyer au maximum tous les
éléments démocratiques de la population russe pour s’en
faire des alliés. Seul un parti ouvrier indépendant peut
être un rempart solide dans la lutte contre l’autocratie, et
c’est uniquement en s’alliant à un tel parti, en le soutenant,
que tous les autres combattants pour la liberté politique
pourront déployer largement leur activité.

Enfin, troisièmement : « En tant que mouvement et
tendance socialiste, le Parti social-démocrate de Russie
poursuit l’œuvre et les traditions de tout le mouvement
volutionnaire antérieur en Russie ; considérant que la
conquête de la liberté politique est la principale tâche im
médiate de l’ensemble du Parti, la social-démocratie marche
vers le but qu’avaient déjà nettement tracé les glorieux