☭ Lénine : Œuvres complètes informatisées

| Éditions Communistus

Volume 04 pages 164-165

REPONSE A MONSIEUR P. NEJDANOV
Dans le n° 4 de la Jizn, M. P. Nejdanov analyse quel
ques articles, y compris le mien, sur la théorie des marchés.

Mon intention est de ne répondre qu’à une seule allirmation
suivant laquelle j’aurais « dénaturé la lutte que je mène
contre la théorie des tierces personnes » par mon article
paru dans le numéro 1 du Naoulchnoïé Obozréniê de
l’année en cours. Quant aux autres questions posées
par M. P. Nejdanov au sujet do la théorie dos marchés
et, notamment, des vues de P. S trouvé, je me bornerai
à renvoyer le lecteur à l’article où je réponds à ce dernier
(« Nouvelles remarques sur la théorie de la réalisation »
dont la publication dans cette revue a été retardée pour
des raisons indépendantes de la volonté de l’auteur).

M. P. Nejdanov allirme que « dans la production capi
taliste il n’y a aucune contradiction entre la production
et la consommation». Il en déduit qu’en admettant cette
contradiction, «Marx soutirait d’une grave contradiction
intérieure», et que je reprends l’erreur de Marx.

Je considère l’opinion de M. P. Nejdanov comme com
plètement erronée (ou iondée sur un malentendu) et ne puis
discerner aucune contradiction dans les vues de Marx.

La thèse de M. P. Nejdanov*sur l’absence, au sein du
capitalisme, de toute contradiction entre la production et
la consommation est si étrange qu’on ne saurait l’expliquer
que par le sens tout à lait spécial attribué par l’auteur à
la notion de « contradiction ». En eltet, M. P. Nejdanov es
time que « s’il existait réellement une contradiction entre
la production et la consommation, elle devrait lournir
systématiquement un produit excédentaire » (p. 301 ; on
relève la même idée dans les thèses de la conclusion,
p. 316). C’est là une interprétation complètement arbitraire

et, à mon avis, complètement fausse. Pour critiquer ma posi
tion, M. P. Nejdanov devait (me semble-t-il) exposer au
lecteur la façon dont je conçois cette contradiction, et
non se borner à présenter ses propres vues sur la nature et
la signification de cette dernière. Ce qui fait le fond de la
question (qui a suscité la polémique dirigée contre moi par
M. P. Nejdanov) c’est que je conçois ladite contradiction tout
autrement que ne le veut M. P. Nejdanov. Je n’ai dit nulle
part que cette contradiction devait donner systématiquement*
un produit excédentaire ; je ne le pense pas, et il est impossible
de tirer des paroles de Marx une telle conclusion. La contradic
tion inhérente aucapitalismeentre laproduction et la consom
mation consiste en ceci que la production croît avec une énor
me rapidité et que la concurrence lui imprime une tendance à
l’extension illimitée, alors que la consommation (indivi
duelle), si même elle s’élève, ne le fait que très faiblement;
la situation prolétarisée des masses populaires ne permet pas
à la consommation individuelle d’augmenter rapidement.

Il me semble que tout lecteur attentif des pages 20 et 30
de mes Etudes (article sur les disciples de Sismondi cité
par M. P. Nejdanov) et de la page 40 du Naoulchndié Obo
zrénié (1899, n° 1)** sera convaincu que, dès le début, j’ai
considéré exclusivement clans ce sens la contradiction entre
la production et la consommation en régime capitaliste.

Au demeurant, on ne saurait conférer à ce phénomène
aucun autre sens si l’on s’en tient rigoureusement à la
théorie de Marx. La contradiction inhérente au capita
lisme entre la production et la consommation réside uni
quement en ceci que la richesse nationale augmente en
même temps que s’aggrave la misère du peuple, que les
forces productives de la société se développent sans qu’il
y ait un accroissement correspondant de la consommation
populaire, sans que ces forces productives soient utilisées
au profit des masses laborieuses. Entendue dans ce sens,
♦ Je souligne systématiquement, parce que la production non
systématique d’un produit excédentaire (crises) est inévitable dans
la société capitaliste du fait que la proportionnalité entre les diffé
rentes branches de l’industrie y est perturbée. Or, un certain état de
la consommation est l’un des éléments de la proportionnalité.

♦♦ Voir V. Lénine. Œuvres, tome 2, pp. 152-153, 165, et le
présent tome, pp. 57-59. (TV.R.) . ...