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COMMENT L'ISKRA FAILLIT S’ETEINDRE
J’arrivai d’abord à Zürich, j’y arrivai seul et sans avoir
vu au préalable Arséniev (Potressov). P. Axelrod m’y
reçut à bras ouverts, et je passai deux jours en conversation
tout à fait cordiale. On eût dit deux amis qui ne s’étaient
pas vus depuis longtemps : nous parlions de tout et de bien
d’autres choses encore, à bâtons rompus, absolument sans
aucune préoccupation pratique. Sur les questions pratiques,
Axelrod n’avait d’ailleurs pas grand-chose à dire * :
on voyait seulement qu’il en tenait pour G. Plékhanov,
car il insistait pour monter l’imprimerie de la revue à Ge
nève. Dans l’ensemble, il se faisait très « cajoleur » (passez
moi l’expression), disant que pour eux tout était lié à notre
entreprise, que c’était pour eux une renaissance, que main
tenant « nous » aurions le moyen de résister aussi aux
exagérations de Plékhanov. Je remarquai particulière
ment ce dernier point, et toute la suite de l’« histoire » a
montré que c’étaient là en effet des paroles vraiment si
gnificatives.
J’arrive à Genève. Arséniev me prévient qu’il faut
être très prudent avec Plékhanov, qui est terriblement irri
té de la scission 120 et très soupçonneux. Les entretiens que
j’eus avec ce dernier me montrèrent en effet d’emblée qu’il
était réellement soupçonneux, susceptible et rechthaberisch
jusqu’au nec plus ultra **. Je m’efforçai d’être prudent,
d’éviter les points « névralgiques », mais cette façon d’être
constamment sur le qui-vive ne pouvait certes pas manquer
* En allemand dans le texte : mitsprechen kann. (N.R.)
** Absolument convaincu d’avoir toujours raison. (ÏV.l?.)